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Tourisme ethnique aux frontières chinoises

Auteure : Sarah Coulouma
IrAsia (AMU-CNRS; UMR 7306) – http://www.irasia.cnrs.fr

À l’extrême sud-ouest du territoire chinois, un hameau villageois a été surnommé la « dernière tribu primitive de Chine »…

Diversité de populations

Le gouvernement de la République populaire de Chine (RPC) reconnaît 56 « nationalités » (minzu 民族). Les Han, communément appelés Chinois, constituent 92 % de la population tandis que les 55 « nationalités minoritaires » (shaoshu minzu 少数民族) comptent pour les 8 % restant. Ces dernières se répartissent principalement dans les provinces frontalières du pays. Elles ont une très grande diversité de pratiques culturelles (langues, systèmes de croyance ou religions, artisanats, systèmes de parenté, etc.) et vivent dans des territoires aux caractéristiques géoclimatiques et démographiques variées. Parmi les nationalités minoritaires de RPC, la nationalité Wa est principalement présente dans le sud-ouest de la province du Yunnan.

Tourisme ethnique au Yunnan

Depuis le début du xxie siècle, la province du Yunnan fait du secteur des activités touristiques un levier de croissance économique. Ces activités se concentrent autour de sites naturels et culturels où vivent des groupes rattachés aux nationalités minoritaires. Ces populations et leurs cultures sont ainsi souvent­ ciblées en tant que ressources à part entière pour le développement d’un tourisme ethnique. C’est par exemple le cas de la nationalité Wa pour laquelle deux sites touristiques sont aujourd’hui renommés : Dazhai dans le district de Ximeng et Wengding dans le district de Cangyuan.

À l’entrée du site, l’édifice en bois décoré d’une quinzaine de crânes de buffles et gravé de la mention « Wengding, la dernière tribu primitive de Chine » est une mise en scène de l’allégorie du sacrifice de buffle. Crédits photos : Sarah Coulouma

Wengding 翁丁 : « dernière tribu primitive de Chine »

À quelques kilomètres de la frontière sino-birmane, Wengding est habité par 103 familles du groupe ethno­linguistique wa-paraok. Depuis 2006, le village est qualifié par les agences de voyages et les services gouvernementaux de « dernière tribu primitive de Chine » dans le cadre de son développement touristique. Il a été aménagé pour présenter et préserver la « culture de la nationalité wa » (wazu wenhua 佤族文化). Cela se traduit par une mise en scène des espaces villageois qui répond à la quête d’exotisme et d’altérité des visiteurs, principalement Han. Cette mise en scène participe au maintien, voire renforce, des rapports sociaux hiérarchisés entre la Chine centrale et de l’Est, berceau de la civilisation chinoise, et cette zone frontalière, terre sauvage où vivraient des populations aux mœurs arriérées. Face à cela, la communauté villageoise n’est pas passive. Les habitants de Wengding tirent des bénéfices de la vente de produits agricoles et artisanaux locaux, ils s’opposent parfois, réinventent, s’approprient, sont résilients et résistants face au développement touristique. Ils négocient leurs places dans cette arène touristique, et plus largement dans la société chinoise contemporaine, partagés entre la transmission de valeurs et de pratiques ancrées dans la mémoire sociale locale et leur souhait de modernité.

Profitant de l’opportunité commerciale que représente la venue de touristes dans leur village, beaucoup d’habitantes de Wengding tissent des sacs, des parures, des tentures qu’elles agrémentent de motifs grâce à la technique du façonné et vendent sur de petits étals devant leur maison. Crédits photos : Sarah Coulouma
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