Retour à Pacifique

Les travailleurs asiatiques dans le Pacifique au XIXe-XXe siècles

Auteur : Isabelle Merle
CREDO (AMU-CNRS-EHESS; UMR 7308) – http://www.pacific-credo.fr 

Comme la plupart des territoires du Pacifique, la Nouvelle-Calédonie et le Vanuatu ont connu au xixe et xxe siècles une immigration en provenance d’Asie dont la présence et l’influence ont marqué durablement l’histoire de ces pays.

Les débuts de l’immigration : l’arrivée de travailleurs chinois

Arrivés à bord de navires comme cuisiniers, comme charpentiers sur les goélettes des santaliers ou encore comme pêcheurs de bêche-de-mer, les premiers Chinois s’installent en Nouvelle-Calédonie et au Vanuatu dès les années 1840. Alors que la présence chinoise s’affirme rapidement dès le xixe siècle en Polynésie française, elle reste très minoritaire en Nouvelle-Calédonie jusqu’aux années récentes et ne prendra véritablement son essor au Vanuatu que dans le courant du xxe siècle. Pour répondre aux besoins de main-d’œuvre de l’industrie minière et du colonat, les gouverneurs successifs en poste à Nouméa préfèrent organiser la venue de travailleurs engagés sur contrat à la suite des accords qu’ils négocient avec les gouvernements du Japon d’abord (après plusieurs tentatives infructueuses avec la Chine) puis de l’Indochine française au Tonkin et des Indes néerlandaises à Java enfin.

Village minier de Thio
Village minier de Thio. © Archives de Nouméa

Les travailleurs japonais prennent le relais

En 1892, un premier contingent de tra­vailleurs japonais arrive en Nouvelle-Calédonie pour travailler dans les mines au service de la société Le Nickel. Mais les mauvaises conditions de travail créent d’emblée des conflits et un mouvement de grève. Le gouvernement japonais s’inquiète, par ailleurs, des mesures répressives incluses dans les contrats d’engagement et de la législation locale à l’encontre de ces travailleurs, que la Nouvelle-Calédonie assimile juridiquement aux indigènes. Il obtient, en 1900, que les travailleurs japonais soient traités comme des ouvriers étrangers libres ayant le droit de quitter leur employeur et de circuler. 5 500 ouvriers japonais sont ainsi recrutés jusqu’en 1919 et parmi ces derniers, certains s’installent en Nouvelle-Calédonie entre les deux guerres, jouissant d’un statut qui leur permet d’acheter des terres et d’ouvrir des magasins.

Une main-d’œuvre plus « contrôlable » : l’immigration tonkinoise et javanaise

Pour pallier les difficultés de recrutement, le gouvernement colonial de la Nouvelle-Calédonie se tourne, dès les années 1890, vers le Tonkin et Java, où la population rurale est nombreuse, pauvre et soumise aux lois répressives des puissances coloniales. Ils espèrent ainsi garantir la non-contestation des conditions d’engagement en Nouvelle-Calédonie et au Vanuatu. Les premiers Tonkinois débarquent en 1891, suivis par les Javanais en 1896. Entre les deux guerres, le recrutement s’accélère amplifiant la présence asiatique des travailleurs engagés. En 1936, plus de 7 000 Tonkinois et Javanais travaillent sur les mines ou sur les propriétés aux côtés de quelque 17 000 colons français et 28 800 Kanak.

Les départs

En 1941, les 1 100 Japonais installés en Nouvelle-Calédonie seront expulsés à la suite du déclenchement de la Guerre du Pacifique. Par ailleurs, les années 1946-1963 marquent le reflux de travailleurs javanais puis tonkinois rapatriés dans leurs pays respectifs désormais indépendants.

Tombe d’une travailleuse vietnamienne à Voh
Tombe d’une travailleuse vietnamienne à Voh. Crédit photo : © Isabelle Merle

Bibliographie

  • Adi Catherine, Orang Kontrak. Les engagés originaire de Java venus sous contrat en Nouvelle-Calédonie, 1896-1955, Editions Province nord, 2014
  • Bencivengo Yann, « L’immigration japonaise en Nouvelle-Calédonie : une illustration de l’affirmation du Japon dans le Pacifique, Journal de la Société des Océanistes, 135, 2012, pp. 215-228.
  • Maurer Jean-Luc (avec la collaboration de Marcel Magi et une contribution de Marie-jo Siban), Les Javanais du Caillou. Des affres de l’exil aux aléas de l’intégration. Cahier d’Archipel, N° 35, Paris, 2007.
  • Van Mai Jean, Chan Dang : les Tonkinois de Calédonie au temps colonial, Nouméa, 1980.
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