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L’art des ghostnets en Australie du Nord

Auteur : Géraldine Le Roux, geraldine.leroux@univ-brest.fr
Université de Bretagne Occidentale (UBO)

Les ghost nets sont des filets de pêche perdus ou abandonnés en mer, qui dérivent jusqu’aux zones littorales affectant potentiellement mammifères marins, crustacés, récifs coralliens et mangroves. Les activités humaines peuvent aussi être impactées.

Ce phénomène touche particulièrement les régions côtières du nord de l’Australie et certaines îles du Détroit de Torres, des zones de pêche à forte activité. En Australie, une cinquantaine d’artistes répartie principalement dans le nord du pays s’est fait remarquer par un travail unique du filet perdu, l’art des ghostnets. L’intention de ces artistes constitués en collectif est plurielle : sensibiliser le grand public à la question de la pollution marine ; sortir de l’eau les filets usagés avant qu’ils n’endommagent encore plus les écosystèmes ; privilégier le principe du recyclage ; réinterpréter l’art de la vannerie et plus encore. Les artistes autochtones qui participent de ce mouvement artistique s’en servent aussi pour asseoir et valoriser le rapport singulier qu’ils ont à la mer. Chaque artiste ou communauté a développé des techniques singulières. C’est à Pormpurraw qu’a été imaginée pour la première fois l’idée d’associer le corail au filet. Les artistes surmontent leurs personnages ou agrémentent les corps animaliers de fragiles coraux. Élégante et perturbante alliance de l’organique et du synthétique. Entrecouper le tressage de fils synthétiques de légères feuilles de corail est une manière de rappeler l’origine profonde du matériau.

Atelier de création de ghost nets. Crédit : Gina Allain, 2011

L’art des ghostnets est né et se prolonge dans l’échange et la convivialité. Les centres d’arts organisent des ateliers participatifs. Ce sont des moments où chacun apporte son savoir-faire et son approche artistique. On y apprend les bases : le tressage, la vannerie, la couture, etc. Les artistes et participants apprécient ces moments de transmission intergénérationnelle et interculturelle. Les matériaux utilisés, de la fibre synthétique issue des filets de pêche et des cordes usagées, sont nouveaux mais la posture des participants et les techniques utilisées sont identiques au travail de la fibre végétale.

Maicey Lalara posant avec son panier en filet de pêche en cours de réalisation (2018). Sur l’île de Groot Eyland (Territoire du Nord, Australie), les vanniers aiment associer fibres synthétiques et végétales. Credit : © Lalara, Project Officer at Anindilyakwa Artsfrom Umbakumba Community, Groote Eyelandt, photo by ALy de Groot, courtesy of Anindilyakwa Arts
Nam, tortue, œuvre collective, île d’Erub, 2015 La tortue réalisée pour l’installation d’art australien du Musée océanographique de Monaco a demandé l’investissement d’une quinzaine d’artistes sur environ deux semaines. En plus de la transmission d’un savoir-faire, il y a dans cet art un partage des connaissances ancestrales de la faune et de la flore, qui est un véritable levier de création pour l’art des ghostsnets. Crédits photos : © Géraldine Le Roux, 2015
Crocodile Spirit Man, œuvre de Michael Norman, Pormpuraaw, Queensland, 2018. © Géraldine Le Roux
Bushbike, œuvre collective, Aurukun, côte ouest du Cape York. © Gina Allain

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